Entrer dans l’intimité de Victor Hugo. Devenir familier de l’homme, de l’artiste visionnaire, du penseur engagé et bien sûr de l’écrivain de génie.
Parcourir les lieux où il a vécu
C’est tout cela qu’offre le musée, depuis son origine. C’est en 1901, en prévision du centenaire de Victor Hugo, que Paul Meurice, en accord avec les petits enfants du poète, Georges et Jeanne, ainsi que leur mère Alice Lockroy, propose à la Ville de Paris, de créer une Maison de Victor Hugo à l’image de celles de Dante, de Shakespeare ou de Goethe. Le lieu choisi est dans l’hôtel de Rohan Guéménée, au 6, place des Vosges, où le poète a vécu de 1832 à 1848, et dont la ville est propriétaire.
Inauguré le 30 juin 1903
Le musée est l’expression de la passion et de la générosité de Paul Meurice. Prodigue, il fait don de sa collection et acquiert celle de Juliette Drouet dont avait hérité son neveu Louis Koch, pour l’offrir au musée. Il consacre les droits d’auteur que lui rapporte l’édition définitive des œuvres de Victor Hugo pour acheter des œuvres complémentaires ou suscite des dons pour compléter des lacunes. Il passe aussi commande à des artistes vivants pour célébrer Hugo ou son œuvre et finance des travaux d’aménagement. Surtout, il se fait le véritable concepteur du musée. Il entraîne la complicité et la générosité de la famille qui soutient le projet de dons particulièrement importants comme, entre autres, les portraits qui étaient à Hauteville House ou la chambre mortuaire du grand homme.
Paul Meurice a 18 ans lorsqu’en 1836, admirateur passionné du poète, il franchit pour la première fois la porte de l’appartement de Victor Hugo, place Royale. Au soir de sa vie, le 30 juin 1903, il passe de nouveau ce seuil du 6, place des Vosges pour inaugurer le musée qu’il a conçu et dont il a porté le projet.
Entre ces dates, Paul Meurice a mené une carrière d’auteur dramatique. Auguste Vacquerie, son ami de collège le mena chez Victor Hugo. C’est avec lui qu’il fit ses débuts, en 1842, travaillant avec Théophile Gautier pour une adaptation de Falstaff. En 1847, il noue une fructueuse collaboration avec Alexandre Dumas puis avec George Sand.
Aux côtés d’Auguste Vacquerie, qui lui demande d’en être rédacteur en chef, il participe avec Charles et François-Victor Hugo, au journal L’Evénement fondé par leur père, en 1848. Cela lui vaut, en 1851, de partager la prison avec les fils du poète après la publication d’un article contre la peine de mort. C’est à ce moment que Victor Hugo doit prendre le chemin de l’exil et vendre ses biens. Cette vente fait de Meurice le premier hugolâtre collectionneur avec l’acquisition de plusieurs pièces et surtout de ce dessin majeur qu’est Le Burg à la croix. Il devient aussi le dépositaire des meubles et des œuvres que la famille conserve et qu’il acheminera plus tard à Guernesey.
Durant les dix-huit années de l’exil, Meurice est à Paris, l’homme de confiance et le relais dont Hugo a besoin. Il est ainsi chargé – dans un constant dialogue dont témoigne la correspondance conservée – de la publication des œuvres, des contrats, des relectures et des corrections. Il veille également, lorsque la censure se desserre, à la programmation des pièces de théâtre, au choix des salles et des acteurs. Il rédige l’adaptation des Misérables qu’il met en scène avec Charles Hugo en 1863.
Ce faisant Paul Meurice mène sa propre carrière portant à la scène ses nombreuses pièces de théâtre parmi lesquelles Benvenuto Cellini (1852), Schamyl (1854) La Famille Aubry (1857), la célèbre Fanfan la Tulipe (1858), Le Maître d'école (1858) ou encore François les bas bleus (1863) dont le musée conserve les manuscrits...
En 1869, peu de temps avant la chute du Second Empire, toujours avec Auguste Vacquerie et les fils de Victor Hugo, il fonde le journal Le Rappel. La chute de l’Empire ne peut que resserrer les liens : c’est chez Meurice que Victor Hugo s’installe à son retour à Paris et à la fin de sa vie il prendra l’habitude de passer l’été dans sa villa de Veules-les-Roses. La complicité littéraire se poursuit, avec les adaptations à la scène de Notre-Dame de Paris en 1879 et de Quatrevingt-treize en 1881. Meurice est de plus en plus chargé du suivi éditorial, en particulier des œuvres complètes qui se succèdent. Cette tâche se prolongera après la mort de l’écrivain qui l’institue exécuteur testamentaire de son œuvre littéraire.
Ces longues années d’un lien profond d’amitié et de collaboration ont été ponctuées par Hugo de maints témoignages de reconnaissance : livres dédicacés, dessins envoyés pour le nouvel an ou à l’occasion d’une visite. Ainsi se forme une collection dont Meurice va faire le noyau du musée dont il rêve et dont il conçoit les principes. Dans ce but, il met toute sa passion à compléter cette collection par des achats ou des dons qu’il obtient. En 1902, il peut l’offrir à la Ville de Paris afin que place des Vosges, Hugo soit célébré à l’égal de Dante, de Shakespeare ou de Goethe par « sa maison ».
La donation de 1927
Cette générosité familiale ne se démentira pas. En 1927, deux ans après la mort de Georges Hugo, sa sœur et ses enfants, Marguerite, François et Jean, font don à la Ville de Paris de la maison que Hugo avait acquise et aménagée à Guernesey, Hauteville House. Ce lieu symbolique à la fois de l’exil et de l’écriture de tant de grandes œuvres est aussi l’expression, à travers ses saisissants décors, de l’univers poétique et philosophique de Victor Hugo. Plus tard, après la seconde guerre mondiale et jusqu’en 1980, le peintre Jean Hugo constituera véritablement le fonds de manuscrits du musée que complèteront des dons de collectionneurs. Tout au long de l’histoire du musée, jusqu’à aujourd’hui une politique d’acquisition active et de nombreuses libéralités n’ont cessé de faire croître la collection.
De nos jours
Les visiteurs qui se rendent à Guernesey peuvent découvrir ce sanctuaire conservé dans son intégrité. A Paris, le musée se partage entre l’appartement de Victor Hugo au second étage et, au premier étage, un espace dévolu aux expositions temporaires.
Le musée reste fidèle au programme défini par Paul Meurice dès l’origine, de rendre compte de Victor Hugo selon toutes les facettes de l’homme, de l’écrivain et de l’artiste, de témoigner du rôle qu’il eut dans son époque et de l’écho qu’il continue d’avoir dans la nôtre.
Jean Hugo, l’un des grands peintres du XXe siècle, fut aussi un grand donateur du musée.
Jean Hugo nait le 19 novembre 1894 à Paris. Il est le fils de Georges Hugo et de Pauline Ménard-Dorian, le petit-fils de Charles Hugo et l’arrière-petit-fils de Victor Hugo. Il a une sœur, Marguerite et un demi-frère, François, orfèvre spécialisé dans la création de bijoux d’artistes. Jean, lui, entre dans l’âge adulte par la guerre.
Mobilisé dès le 4 septembre 1914, Jean Hugo est affecté au 36e régiment. Au printemps 1915, il est blessé sur le front d’Artois. De retour au combat en novembre, il participe à la bataille de la Somme, puis à celle de Verdun. Nommé sous-lieutenant, il est affectécomme interprète à la 1re division américaine et prend part à la bataille de Cantigny, en 1918. Il est décoré de la Distinguished Service Cross. Sa vocation artistique nait durant la guerre où il réalise de nombreux dessins, comme son père qu’il croise sur le front.
En 1919, Jean Hugo épouse Valentine Gross, peintre aussi, connue sous le nom de Valentine Hugo. Tous deux fréquentent les milieux d’avant-garde. Ami de Cocteau, de Radiguet, de musiciens comme Erik Satie, Georges Auric, Francis Poulenc, il réalise de nombreux décors pour le théâtre et le cinéma, notamment pour La Passion de Jeanne d’Arc de Carl Dreyer. Se séparant de Valentine, il s’installe au mas de Fourques à Lunel et se converti au catholicisme, continuant sa carrière de peintre, de décorateur et d’illustrateur. En 1949, il se remarie avec Lauretta Hope-Nicholson (1919-2005) dont il aura sept enfants. Il publie ses souvenirs, sous le titre Le Regard de la mémoire. Il meurt au mas de Fourques en 1984.
Jean Hugo a toujours été conscience de l’héritage que représentait l’œuvre de son arrière-grand-père et du devoir de mémoire à son égard. Aussi a-t-il toujours porté une grande attention au musée. Donateur de Hauteville House au côté de sa tante, Jeanne, de sa sœur et de son demi-frère, il fait aussi don de plusieurs œuvres. Mais surtout, il est véritablement à l’origine de l’important fonds de manuscrits qui a enrichi les collections. En effet, à la création du musée, en conformité avec le testament de Victor Hugo, les manuscrits avaient été exclus des collections. Mais après la mort de Jeanne Hugo, en accord avec le fils de cette dernière, Charles Daudet, et avec sa sœur, Marguerite et son frère François, il a sans doute joué un rôle moteur pour le dépôt, confirmé en don en 1950, d’un important ensemble de manuscrits et de correspondance. Ce n’était que la première marque d’une longue générosité qui s’est poursuivie jusqu’à la veille de sa mort ; au fur et à mesure qu’il trie les archives conservées au mas de Fourques, il fait, jusqu’en 1980, des dons réguliers au musée. Son vœu et son projet étaient que la maison de Victor Hugo soit le conservatoire de la mémoire intime et familiale de Victor Hugo, autour de la correspondance de Victor, de ses proches et de ses relations, d’une part, et d’autre part des écrits des différents membres de la famille, depuis le général Hugo, Mme Hugo, Charles, François-Victor et Adèle. Mais ce sont aussi de précieuses archives, documentant la vie du poète, qui sont entrées au musée grâce à sa générosité. Cet ensemble exceptionnel a eu valeur d’exemple, entrainant de nombreux dons de collectionneurs, comme celui de Georges Ravault, en 1976, comptant plus d’un millier de pièces. La mise en ligne progressive de ces manuscrits sur le portail parismuseescollections.paris.fr entend rendre hommage au rôle majeur joué par Jean Hugo.
Jean Hugo, le peintre, est aussi représenté au musée avec des œuvres libres, peintures, gouaches et dessins et aussi deux ensembles de maquettes de costumes, liés à l’œuvre de Victor Hugo, pour le centenaire de Ruy Blas et pour un projet de film d’après L’Homme qui rit.